Ah ben. Vois-tu ce que je vois? Là au milieu de la foule sur la place public? Y'a un Homme. Un Homme avec un grand H parce que ça peut être un homme ou une femme. Je vois un homme. Peut-être vois-tu une femme. Mais ce n'est pas sans importance, fais attention au visage que tu donnes à ton Homme. Il a l'air heureux, en parfait contrôle de la situation. Souriant, détendu, il regarde les passants déambuler tout autour de lui sans ce regard fuyant que provoque la culpabilité dans le coeur.

Son visage est serein, calme. Pas rayonnant, ni illuminé mais éclairé comme quelqu'un qui se sent bien dans sa peau. Et c'est vrai: il se sent bien dans sa peau. Tout lui réussit: sa carrière, sa famille, sa vie personnelle, tout témoignagne de sa réussite. Même ses ennemis le louent et n'ont plus le goût de se chicaner avec lui.


Mais des yeux te sont donnés pour voir et tu vois. Tu n'avais pas remarqué avant parce que c'est juste à ce moment que tu vois. Et tu vois: son être intérieur. Et ça te tombe dessus comme une chape de plomb. Comment est-ce possible? Comment dans 1000 ans cela pourrait-il être possible? Si tout est possible à Dieu, l'homme est capable du pire et cela durant des millénaires. Tu vois et ça te remplis de tristesse et de colère: comment est-ce possible? Tu fermes les yeux en pensant: Je ne vois pas ce que je vois. Je ne veux pas voir cela. Une telle ignorance te remplis d'effroi et tristesse mais en même temps tu sens la colère gronder en toi à cause du trompe-l'oeil. Tu essaies de détacher tes yeux mais tu ne le peux pas: la condition de cet Homme est trop grave. Finalement, la colère disparaît pour faire place à la compassion; l'Homme ne doit pas savoir mais il doit savoir; la petite flamme presque éteinte que tu as vue est ce qui te remplit de tristesse.

Soudain, l'Homme se retourne et regarde au loin. Son visage que tu vois tout de même s'assombri; qui donc vient déranger sa tranquilité? A mesure que ce qu'il voit au loin se rapproche, son visage se tranforme et la peur et la crainte apparaissent en remplacement de l'irritation. Il sait, il reconnait ce qu'il voit mais ne peux l'admettre; c'est impossible. Tu vois aussi ce que voit  l'Homme et tu es anxieux quant à ce qu'il va faire. L'Homme est incertain; ses traits se modifient successivement pour faire place à toute la gamme des émotions qui mènent au désespoir.

Que faire? Il raisonne en lui-même: Ce n'est pas pour moi; c'est pour quelqu'un d'autre ici. Peut-être cette femme avec des talons et la jupe trop courte; ou cet ivrogne affalé par terre le dos contre le mur de la banque; ou cet homme aux bras de sa secrétaire; n'importe qui mais pas moi, c'est certain Pourtant, ça semble se diriger droit sur lui. Mais encore: ça peut passer à côté de lui et envelopper son voisin. Je n'ai pas besoin... pense-t-il alors que ça accélère en sa direction. Il prend sa décision.

L'Homme court. Il court comme si tous les démons de l'enfer étaient à ses trousses. Il entend sa respiration et n'a pas le temps de penser à autre chose que la fuite. Un ennemi le poursuit. Il en est persuadé, mais il se trompe et tu le sais; c'est la seule explication et il fuira aussi longtemps que ce sera nécessaire. On essaie de le tromper! Mais il ne se fera pas prendre. Certainement pas! Non monsieur, madame! Il court à travers les rues de sa ville et pense à s'en aller ailleurs pour tenter de semer et de perdre son poursuivant; seulement, il semble que ce qui le poursuit demeure toujours à quelques mètres derrière lui sans se presser; comme si son poursuivant avait l'éternité devant lui.

Il tourne à droite à un carrefour tout en essayant d'éviter d'entrer en collision avec les passants. A droite. A gauche. A droite. A gauche. Il court ainsi de longues minutes sans se rendre compte que la pénombre commence à s'étendre sur la ville et que sera bientôt la nuit.

Il commence à avoir un point de côté et se dit que s'il ne trouve pas rapidement un endroit où se cacher, il est cuit. Il ne s'est pas aperçu qu'il a fuit vers un quartier beaucoup moins populeux; qui est rempli de ruelles malfamées et d'impasses de mauvaise réputation. Comment ai-je atterri ici? pense-t-il. Il prend un tournant sans y penser parce qu'il arrive à peine à penser; il a mal partout, sa respiration est sifflante parce qu'il court depuis trop longtemps sans avoir la forme pour le faire et se retrouve dans une impasse. Il ne lui reste qu'une chose à faire. Se retourner et VOIR.

L'Homme se retourne et ses yeux deviennent les tiens et tu ne vois plus l'Homme mais plutôt ce qui est devant lui.

CHRIST.

Jésus-Christ te poursuit. Cesse de courir, lâche ton masque, retourne-toi, renonce à toi-même et suis-le.

Au nom de Jésus-Christ.

Alors Jésus dit à ses disciples: "Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix, et me suive. Car quiconque voudra sauver sa vie, la perdra; et quiconque perdra sa vie pour l’amour de moi, la trouvera; Car que servirait-il à un homme de gagner tout le monde, s’il perdait son âme? Ou que donnerait l’homme en échange de son âme ?" (Matthieu 16:24-26)
 
Michel Dubois 

 

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